Nouméa, un cargo arraisonné et abandonné : et l’équipage ?

02/07/2025

Le navire Kokoo, petit cargo de 1 400 tpl, battant pavillon tanzanien, est parti de Taïwan et a fait un long périple le long des côtes australiennes. Les mauvaises conditions météo ont contraint le cargo à faire escale à Nouméa. Ce navire date de 1994, est propriété d’une société de Hong Kong, Shishishung trading, selon la base Equasis. Les douaniers ont trouvé des cigarettes dissimulées dans cinq conteneurs, 75,8 tonnes de cigarettes de contrebande, le 5 février 2025. C’est ainsi une saisie très importante, dont la valeur est estimée, à plus de quatre milliards de francs Pacifique, soit 34,6 millions d’euros. À bord, se trouvaient aussi deux vedettes rapides, type go fast, dotées de quatre moteurs de 300 ch, permettant la livraison sur la côte.

Le capitaine, d’origine birmane, a reconnu les faits. Il a été déféré devant le parquet de Nouméa pour comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité. La peine proposée par le procureur de la République - dix mois d’emprisonnement avec sursis, amende douanière de 41,75 millions de francs (349 865 euros), saisie des biens confisqués et bien sûr destruction du tabac - a été agréée par le tribunal le 7 février 2025.

L’équipage de ce navire arraisonné, 6 marins chinois et 7 marins birmans, a été pris en charge par les services de l’Etat : approvisionnement en vivres et soins médicaux, avec le concours de la délégation territoriale de la Croix rouge française et de la société Saint-Vincent de Paul. Le navire a été immobilisé pour de graves défauts de sécurité, mettant en péril l’équipage et l’environnement marin, précisent les autorités calédoniennes dans un communiqué, après son arraisonnement par les douanes. L’armateur ayant disparu, le navire a été déclaré abandonné le 30 avril 2025. Sans agent maritime, les treize marins à bord ont vu leur situation se dégrader : pas de ressources (alimentation et hygiène) et plus de versement de salaire en raison de leur abandon, et pas non plus de gardiennage à quai, assuré normalement par une agence, faute de financement. L’équipage a ainsi été abandonné sans salaires, ni rapatriements, de sorte que le tissu local des associations de marins et d'armateurs, l’a secouru. La solidarité a fonctionné, même s’il manque un Seamens Club à Nouméa. Concernant l’absence de rémunération, le Haut-Commissariat a saisi le procureur de la République de Nouméa, sur les infractions graves liées à la situation d'abandon du navire et de ses marins contre l’armateur. 

Le Synmar NC, syndicat représentatif des marins néo-calédoniens, a contacté les organisations internationales (OMI et OIT) et l’ITF, la Fédération Internationale des ouvriers des Transports ; ce soutien semble avoir été décisif. Attache a été prise avec les services consulaires des pays d’origine des treize marins : le 21 juin 2025, les six marins chinois ont été rapatriés. Les démarches se poursuivent pour le rapatriement des sept marins birmans encore présent à bord, précise le haut-commissariat de la République.

Patrick CHAUMETTE

 

Sur les Seamens Clubs canadiens, v. Zuidema, J., D. Shan, K. Walker, and A. Jahanbakhsh. 2023. Port-based seafarers’ welfare in Canada: resources and gaps. Marine Policy 147:105336. https://doi.org/10.1016/j.marpol.2022.105336

 

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